Les conditions et les droits pour la communauté LGBT évoluent progressivement. On pourrait dire lentement mais surement. Une bataille à la fois pour les gays et lesbiennes de l’Inde. Pour les touristes homosexuels, vous ne devriez pas vivre des situations désagréables. Toutefois, vous devez faire attention dans certains quartiers des grandes villes et dans certains villages moins touristiques.

Droits des homosexuels en Inde

L’article 377 du Code pénal de 1860 prévoit une peine d’emprisonnement allant de dix ans à la perpétuité, ainsi qu’une amende, pour tout homme reconnu coupable d’avoir commis un acte charnel contre nature avec un autre homme. Il faut toutefois noter qu’aucune condamnation n’a eu lieu depuis plus de vingt ans. Plusieurs autres articles, à divers niveaux législatifs, peuvent être utilisés par les autorités policières pour harceler ou arrêter des personnes de minorités sexuelles.

Contexte social pour les gays et lesbiennes de l’Inde

La situation de l’homosexualité en Inde, comme dans d’autres pays d’Asie du Sud et d’Asie du Sud-Est, est paradoxale. La criminalisation de l’homosexualité, instaurée par le colonisateur britannique alors que la moralité victorienne sévissait contre les pratiques sexuelles marginales, a été récupérée par le nationalisme indien qui a fait de l’homosexualité un phénomène étranger à la société et à la culture nationale indienne. Le paradoxe est d’autant plus fort que, dans la tradition hindoue, la marginalité sexuelle avait une certaine légitimité et un rôle social. En effet, les hijras, des hommes, traditionnellement castrés, adoptaient l’apparence des femmes, et jouaient un rôle important dans les rites religieux et les festivités.

Ces pratiques, condamnées par le colonisateur britannique, sont par conséquent devenues taboues dans la société indienne elle-même. L’espace de liberté pour les minorités sexuelles s’est peu à peu rétréci. Les hijras, qui jouent encore un rôle dans les festivités hindoues, ne disposent néanmoins pas du respect et du soutien de leur famille et de leurs proches.

Rejetés par leur famille, ils n’ont souvent d’autre choix que de devenir des travailleurs du sexe, car les possibilités d’emploi sont très rares et ils doivent se replier sur le soutien de la communauté très structurée des hijras. Dans les milieux populaires non anglophones, on trouve aussi des kothis, c’est-à-dire des hommes qui adoptent de façon circonstancielle une apparence féminine et recherchent les contacts sexuels avec d’autres hommes. Les kothis sont eux aussi stigmatisés par la population pour leur non-conformité de genre, et comme les hijras, sont souvent victimes de violence physique, sexuelle et psychologique de la part de leur famille, de leurs clients et des policiers.

Aujourd’hui, seule une petite partie de la population, principalement urbaine, anglophone et mobile, peut afficher ouvertement son homosexualité sans risquer de mettre en péril sa sécurité et son intégrité. La globalisation a effectivement permis l’émergence, dans les plus grandes villes (New Delhi et Mumbai entre autres), de lieux destinés aux homosexuels (clubs, discothèques, festivals de cinéma), en plus de groupes de discussion sur Internet, mais ces espaces sont peu accessibles aux moins fortunés et aux non-anglophones. Les hommes homosexuels de milieux ruraux et pauvres, les hijras, les kothis et les femmes homosexuelles n’ont souvent que très peu de possibilités d’émancipation.

Bien que l’article 377 n’ait été rarement utilisé lors de procès (de 1860 à 2000, il n’y a eu que 46 cas, seulement six impliquant deux hommes, dont un seul cas impliquait deux hommes consentants), son existence et l’existence d’autres lois ambiguës permettent aux autorités policières de harceler, d’intimider, d’extorquer, d’arrêter arbitrairement, de brutaliser les personnes de minorités sexuelles et d’en abuser sexuellement. Des cas de meurtres ont par ailleurs été documentés.

La représentation des minorités sexuelles dans les médias est au mieux stéréotypée, dans la presse anglophone, voire ouvertement homophobe dans la presse régionale, où les associations entre homosexualité, criminalité et maladies sont fréquentes. Récemment, l’arrestation de quatre hommes mariés pour avoir eu des rapports sexuels avec d’autres hommes a fait l’objet d’un traitement médiatique franchement hostile, les médias en profitant pour dévoiler l’homosexualité présumée de treize personnalités.

L’hétérosexisme très fort rend pratiquement obligatoire le mariage hétérosexuel, ce qui contraint les homosexuels à vivre une double vie dans laquelle les aventures homosexuelles doivent demeurer dissimulées. La situation des femmes homosexuelles est compliquée par leur subordination, en tant que femmes, dans certains milieux : au cours des dernières années, plusieurs cas de suicides ont été documentés lors desquels de jeunes femmes amoureuses l’une de l’autre et subissant des pressions familiales pour rompre leur relation, se sont enlevé la vie ensemble.

En milieu scolaire, l’homosexualité fait souvent l’objet de stigmatisation et de discrimination, particulièrement lorsqu’il s’agit de jeunes hommes efféminés. Les disciplines médicales tendent pour leur part à concevoir l’homosexualité comme une pathologie : même si les psychiatres indiens ont adopté officiellement le DSM-IV (manuel de diagnostic de l’American Psychiatric Association qui ne reconnaît plus, depuis 1974, l’homosexualité comme une maladie mentale), de nombreux psychiatres persistent à traiter des homosexuels comme si leur orientation sexuelle constituait une maladie.