Le sujet est plus que jamais d’actualité après le jugement rendu par le tribunal de commerce contre – entre autres – les clauses de parité tarifaire d’Expedia. Je sais que le sujet suscite des controverses : certains hôteliers, souvent indépendants, décident de ne plus apparaître sur les Booking.com, Expedia ou Lastminute et fonctionnent très bien sans. Il est vrai que les exceptions existent : les hôtels de petite capacité et/ou situés sur un site paradisiaque ou extrêmement touristique peuvent s’en sortir sans, car ils se remplissent vite (et pour cause) et seuls. Cependant, à mon sens, la plupart des hôtels ont besoin de ces OTA’s (Online Travel Agencies). Je sais que la plupart d’entres vous ne seront pas d’accord. Tant mieux ! Le débat est lancé.

Le marché des agences de voyages en ligne se porte bien

Le tourisme en ligne, ou e-tourisme, est en hausse constante depuis 2006 et selon le cabinet d’études américain PhoCusWright, le tourisme en ligne français devrait générer 23 milliards d’euros de chiffre d’affaires à la fin 2015. La croissance du e-tourisme en France a été multipliée par deux et les agences de voyages en ligne en sont les moteurs. Elles répondent en effet à une demande des fournisseurs de produits touristiques mais aussi des consommateurs. En effet, d’après une étude réalisée par le cabinet Comscore, en mars 2013, 183 millions d’internautes ont visité des sites de voyages en ligne en Europe. A elles seules, les OTA‘s représentent 13% des réservations et génèrent 38% des réservations en ligne, soit une part de marché au global de 15% selon PhoCusWright en 2013.

Pourtant, le marché n’est pas arrivé à maturité : la plupart des seniors préfèrent encore la méthode traditionnelle pour réserver par crainte bien souvent des fraudes dues au paiement en ligne. Cependant, les plateformes de réservation travaillent sur ces problématiques de manière à inciter le client à valider le paiement et ainsi augmenter les taux de conversion.

Alors comment les hôteliers pourraient-ils aujourd’hui se passer des OTA‘s ?

Les agences de voyages en ligne : une opportunité à saisir pour les hôteliers indépendants. Lorsque les agences de voyages en ligne sont apparues, les fournisseurs de produits touristiques ont très rapidement vu une véritable opportunité de se développer. Et pour cause !

Développement de la visibilité sur la toile

Comme je l’écrivais dans mon article traitant de l’e-réputation, la visibilité sur la toile est essentielle mais compliquée à obtenir puisque le secteur est très concurrentiel. Et c’est précisément ce que les OTA‘s peuvent offrir aux hôteliers. Leur force de frappe est telle que dans la plupart des cas, lorsque les internautes lancent des requêtes comprenant le mot clé « hôtel », le site de Booking.com ou d’Expedia leur est proposé. Parmi les 5 plus gros acheteurs de mots clés dans le secteur du tourisme, 4 sont des OTA’s. Seule la chaîne hôtelière Marriott investit elle aussi massivement dans les fameux Google Adwords pour obtenir plus de visibilité. Inutile donc de préciser que les hôteliers indépendants, surtout dans de grandes villes comme Paris ou Lyon, ne peuvent investir autant. Les hôteliers se doivent de rester compétitifs sur la toile en y étant présents mais surtout visibles. L’achat de mots clés tels que « hôtel » et « Paris » ne suffisent plus depuis longtemps à apparaître en première page. C’est pour cette raison qu’un hôtelier indépendant a tout intérêt à travailler avec les agences en ligne qui seront les seules à pouvoir leur apporter cette visibilité indispensable. A noter qu’il est capital de donner les meilleures photographies et les meilleures descriptions possibles aux OTA‘s de manière à véhiculer une image positive de l’établissement.

Diversification de la clientèle

Chaque hôtel aura des objectifs commerciaux qui lui sont propres, en fonction de ses aménagements, de sa typologie de clientèle ou de son secteur géographique. Capter une clientèle différente de celle que l’on a déjà peut en faire partie. Les agences de voyages en ligne peuvent contribuer à cet objectif. Cette image d’un mode de réservation plus populaire proposant des prix cassés est restée ancrée dans l’esprit des consommateurs, bien que celle-ci soit le plus souvent complètement fausse. Prenons l’exemple de Booking.com, qui promet des « tarifs attractifs sans frais de réservation ». Cette promesse permet de capter une clientèle à plus faible contribution qui se sentira souvent privilégiée de pouvoir bénéficier de tarifs plus intéressants. Bien sûr, ce type de clientèle n’est pas forcément idéal pour les hôtels plus haut de gamme. Cependant, il peut être intéressant d’allouer un plus grand nombre de chambres aux agences en ligne lors de la basse saison, de manière à remplir l’hôtel malgré la plus faible demande. Les agences en ligne permettent aussi de capter une clientèle internationale qu’il est parfois difficile d’acquérir pour des hôtels indépendants. Les agences possèdent toutes des sites multilingues, faciles d’utilisation et proposant des moyens de paiement sécurisés qui rassurent la clientèle.

La clientèle séduite par les agences en ligne

Le marché du tourisme en ligne et des OTA‘s ne connaît pas un tel succès par hasard. Si leur croissance ne fait qu’augmenter, c’est précisément parce que c’est vers eux que les clients décident de se diriger. A mon sens, ce n’est pas seulement pour des raisons de visibilité mais aussi car elles sont simples d’utilisation, y compris pour la clientèle senior, moins à l’aise avec l’outil informatique. Le moteur de réservation est simple et clair, tout comme l’est la totalité du parcours de l’internaute sur le site. Le client est guidé étape par étape. L’internaute peut également être mis sous pression de manière très subtile en affichant le nombre de visiteurs présents sur la page de l’hôtel et en précisant le montant économisé en cas de réservation. Parfois même, la mention « plus qu’une chambre disponible » apparaît. La plupart du temps, cette mention est mensongère – puisqu’il s’agit seulement du contingent de chambre attribué au site – mais ça fonctionne ! Enfin, les témoignages des clients directement sur le site pèsent lourds sur la décision de réserver ou de revenir sur le site : le client peut faire d’une pierre deux coups et gagner un temps précieux. Sans rien faire, l’hôtelier a obtenu une réservation… magique ?

Maîtriser sa collaboration avec les OTA‘s

Bien sûr, tout n’est pas tout beau et tout rose : c’est pourquoi les hôteliers sont montés au créneau et les syndicats ont décidé d’attaquer plusieurs agences en justice. Mais selon moi, les hôteliers indépendants doivent simplement apprendre à utiliser la force de frappe des agences en les inscrivant dans une stratégie de distribution multi-canal. Il ne s’agit donc pas de mettre tous ses oeufs dans le même panier en allouant tout le stock de chambre à Booking.com et Expedia, par exemple. Cette problématique se retrouve en effet dans beaucoup trop d’établissements indépendants qui décident de remplir leur hôtel de clients bien souvent infidèles (non returning customers) sans se soucier de leurs indicateurs commerciaux (Prix Moyen et RevPar). Il est alors absolument nécessaire de créer un site internet hôtel facile d’utilisation où il est possible de réserver aussi rapidement que sur les agences de voyages en ligne. 75% des clients ne se cantonnent pas uniquement à la visite de Booking.com ou de Lastminute mais cherchent sur la toile le site de l’hôtel retenu. Ainsi, l’OTA’s aura réussi à capter l’attention du client sur votre établissement, mais la conversion se fera directement sur votre site !

Bien sûr, les agences en ligne ont réussi à se rendre indispensables dans la commercialisation d’un hôtel, ce qui leur a donné un pouvoir de négociation considérable. Cependant, il est possible pour un hôtel indépendant de transiger. Lorsque Booking.com perd un hôtel, le site perd lui aussi du chiffre d’affaires. Aujourd’hui, les agences en lignes poussent comme des champignons : il est alors possible, en cas de commission trop élevée ou de conditions trop restrictives comme c’est souvent le cas, de rompre le contrat pour aller voir ailleurs. L’expérience a été faite par plusieurs établissements hôteliers, avec succès !

Je pense sincèrement que l’hôtellerie indépendante peut tirer son épingle du jeu en matière de distribution en ligne. Il faut simplement trouver le bon équilibre et ne pas donner la totalité de la commercialisation de l’établissement aux agences en ligne. Selon une étude réalisée par CoachOmnium, 8 hôteliers indépendants sur 10 ne s’investissent pas (ou pas assez) sur un commercialisation active de leur établissement. Bon courage, et à vos commentaires !